Pédaler au quotidien, c’est bon pour la santé, bon pour la ligne, bon pour le moral… et bien plus ! Nous sommes allés enquêter auprès de spécialistes. La preuve par les chiffres.
Bien dans son corps, bien dans sa tête
L’étude aurait pu s’intituler : le vélo, un engin qui vous veut du bien ! Pendant 5 ans, un groupe de chercheurs de l’université de Glasgow a analysé le comportement de 260 000 citoyens britanniques dont certains se déplaçaient régulièrement à bicyclette. Et le résultat est pour le moins édifiant.
Les scientifiques écossais ont constaté que parmi la population cycliste, les risques de développer un cancer étaient réduits de 45 %, ceux d’être atteint d’une maladie cardiovasculaire de 46% et le risque de mourir d’une toute autre maladie de 41%. Des données accueillies avec enthousiasme par les médecins.
« Ces chiffres font écho au discours que nous tenons quotidiennement à nos patients », se réjouit Sandra Winter, chef du service de médecine du sport et de l’activité physique, des Hospices Civils de Lyon. « Se dépenser est tout à fait essentiel. La recommandation de base, c’est 30 minutes, 5 fois par semaine ». Une dose de sport quotidienne qu’il est facile de s’auto-administrer à grand renfort de coups de pédales ! « Faire du vélo, c’est très simple. Il n’est pas nécessaire d’y consacrer un moment spécifique comme pour la piscine par exemple. Il suffit d’adopter la bicyclette à chaque fois que possible pour ses déplacements de tous les jours », souligne le docteur Sandra Winter.
Oui, pédaler peut faire maigrir
Le professeur Bente Stallknecht de l’Université de Copenhague, au Danemark, est totalement sur la même longueur d’onde. Avec son équipe, il vient de publier les résultats d’une étude menée pendant six mois auprès de 130 personnes en surpoids ou en situation d’obésité. L’objectif : comparer la perte de masse graisseuse entre des individus utilisant quotidiennement leur vélo pour aller travailler et d’autres effectuant cinq fois par semaine des exercices de fitness à haute intensité ou à intensité modérée.
Verdict : les effets sont presque identiques chez les cyclistes et chez les sportifs à l’activité soutenue (4,2 kg de perdu contre 4,5 kg). Les sportifs invités à pratiquer des exercices moins dynamiques perdent eux 2,6 kg. « Si vous n’avez pas le temps de fréquenter la salle de sport, aller au travail à vélo constitue une excellente alternative », analyse le professeur Bente Stallknecht. « Bien sûr, rien ne vous empêche de combiner les deux ».
L’étude démontre plus précisément les effets positifs du vélo dans la lutte contre le surpoids. Selon l’équipe de recherche danoise, oui, pédaler peut faire maigrir ! « La pratique de la bicyclette peut être intégrée à un programme de perte de poids. Notre étude montre qu’elle induit une hausse des dépenses caloriques sans entraîner mécaniquement une augmentation de prise de nourriture », détaille le médecin de l’Université de Copenhague. « Par ailleurs, faire du vélo est un excellent choix, surtout pour les personnes en surpoids. Il s’agit d’un sport porté. Les articulations de la hanche, du genou et de la cheville ne sont pas soumises à des traumatismes répétés ».
« Après 3 ou 4 séances, les effets positifs se font ressentir »
Sauf à souffrir d’une pathologie entraînant un risque de chute majeur, tout le monde peut donc profiter des bienfaits de la bicyclette. Et ils sont nombreux. « Pour une personne sédentaire, le plus dur, c’est de mettre le pied à l’étrier. Mais après 3 ou 4 séances, les effets positifs se font ressentir. La première chose que me rapportent mes patients concerne l’amélioration de leurs capacités respiratoires, ils se sentent moins essoufflés. Certaines douleurs s’estompent, ils remarquent qu’ils sont moins fatigués. Leur amplitude articulaire se développe. En fait, ils ressentent très vite un mieux-être général », détaille le docteur Sandra Winter de l’hôpital Edouard Herriot, à Lyon. Car les bénéfices de la pratique ne sont pas uniquement physiques. La santé psychique au sens large connaît la même métamorphose. Pédaler stimule les neurones et accroît ainsi la mémoire et les capacités cognitives. Monter en selle régulièrement aide à combattre le stress, permet d’augmenter son temps d’exposition à la lumière, fait gonfler l’estime de soi, améliore la qualité du sommeil… et la liste est encore longue.
Se déplacer à vélo est bénéfique malgré la pollution
Mais ces bienfaits, aussi nombreux soient-ils, ne disparaissent-ils pas en fumée dès lors qu’il s’agit d’intégrer à l’équation les dangers représentés par les accidents de la route et l’exposition à la pollution atmosphérique ? Une étude vient démonter la plupart des idées reçues en la matière.
Selon les résultats obtenus par l’Observatoire régional de santé Ile-de-France en 2012, les bénéfices en termes de mortalité seraient largement supérieurs aux risques. Jusqu’à 20 fois plus élevés, dans l’hypothèse d’un doublement de la pratique du vélo dans la région parisienne d’ici à 2020, soit un passage à 4% de l’ensemble des déplacements.
Des chiffres qui étayent les propos du docteur Arthur Molique du Centre de médecine du sport de Lyon-Gerland. « Il y a autant de pollution dans l’habitacle des voitures que sur un vélo (NDLR : à cause du phénomène de confinement, il y en aurait même davantage selon une étude menée en 2015 par l’Observatoire de l’air en Midi-Pyrénées) », estime le praticien également médecin de l’équipe Cofidis pro de cyclisme. « Pour réduire les risques au maximum, la pratique du vélo doit être encadrée par des mesures de sécurité : port du casque, présence d’éléments réfléchissants, signalisation lumineuse. Et bien sûr, il est nécessaire de respecter le code de la route ! En cas de pollution importante, il existe aujourd’hui des systèmes de masque permettant de filtrer l’air inspiré. »
Rouler à vélo électrique également source de bienfaits
Sur un vélo à assistance électrique (VAE), pédaler n’est pas une option. Même si l’effort est moins soutenu qu’au guidon d’une bicyclette traditionnelle, il n’en reste pas moins un moyen de transport actif. A ce titre, rouler à l’électricité serait donc également source de bienfaits pour la santé.
C’est en tout cas ce que met en avant une étude publiée en 2016 par l’université du Colorado. Après seulement quatre semaines de pratique, les chercheurs américains ont mesuré au sein du public étudié une amélioration des capacités cardiovasculaires et un gain de puissance musculaire.
Plus proche de nous, l’Observatoire national de l’activité physique et de la sédentarité (Onaps) s’intéresse de près à la question. Une étude est en cours dans son laboratoire de Clermont-Ferrand. « Nous menons une observation en vie réelle sur 4 à 5 mois. Les 30 volontaires sont de véritables usagers de vélos électriques. Aucune durée de pratique ne leur est imposée », nous explique Bruno Chabanas, l’un des coordinateurs de l’expérimentation . « Nous cherchons à savoir si leur temps d’activité physique total va réellement augmenter et atteindre les seuils recommandés. Nous souhaitons également mesurer l’impact physiologique grâce à des marqueurs comme la capacité aérobie, le poids et le tour de taille, mais aussi déterminer les conséquences psychologiques de cet usage ».
Les résultats seront publiés courant 2018. En attendant Bruno Chabanas insiste pour balayer les idées reçues concernant le VAE. « Ce n’est pas, comme on l’entend souvent, un vélo pour fainéant. Il s’agit d’une activité physique d’intensité modérée se situant entre la marche et le vélo traditionnel. Si les bienfaits ne sont peut-être pas équivalents à ceux procurés par ce dernier, il ne faut pas opposer les pratiques. L’un des intérêts du VAE, c’est qu’il permet d’élargir la population susceptible de se mettre à pédaler ». Les chiffres des ventes sont là pour en attester. En 2016, en France, 134 000 VAE ont trouvé un acquéreur.
Du vélo sur ordonnance !
Instrument vertueux par excellente, le vélo générerait des bienfaits qui profitent à la société toute entière. Un cycliste de plus sur la route et c’est toute la collectivité qui bénéficie des retombées.
Ainsi, selon la Fédération européenne des cyclistes, l’usage de la bicyclette permettrait d’éviter chaque année 27.860 décès prématurés à l’échelle de l’Union européenne. Un impact sanitaire avec des conséquences économiques considérables. Toujours selon le même organisme, ce sont plus de 96,5 milliards d’euros qui seraient économisés annuellement… en pédalant !
A quand alors, dans ces conditions, le vélo sur ordonnance ? La chose reste confidentielle, mais elle existe déjà. Depuis le 1er mars dernier, les médecins traitant ont la possibilité de prescrire des séances de sport aux patients atteints d’une affection de longue durée (ALD). Faute de financement (les séances ne sont pas remboursées par la sécurité sociale), de formation des professionnels de santé et de structures de terrain adaptées, le dispositif peine à prendre son envol.
« C’est très bien que la loi se soit positionnée sur le sujet », comment le docteur Sandra Winter, « mais il faut aller plus loin en élargissant notamment le public des bénéficiaires. Pour être dans le cadre d’une prévention efficace, il faudrait pouvoir cibler les personnes sédentaires avant qu’elles ne développent une pathologie. »
Du vélo à la place des médicaments, le docteur Arthur Molique ne réfute pas l’idée, bien au contraire : « on arrête des traitements de certains diabètes débutants suite à la reprise d’une activité physique, idem pour les traitements contre le cholestérol. Elle joue un rôle également dans la lutte contre la récidive des pathologies cancéreuses. Je suis par ailleurs persuadé que la pratique du vélo pourrait mettre un frein à la surconsommation d’anxiolytiques et d’antidépresseurs ».
Le vélo pour rester en forme, le vélo pour soigner, pour guérir, mais également comme garant d’un certain équilibre, d’une joie de vivre. Et cela aucune pilule ne peut l’offrir.